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facebook ou pas ?
Ces dernières années, nos modes de communication ont beaucoup évolué:
téléphones portables, SMS, emails, messageries instantanées font partie de
notre vie quotidienne. Et bien sûr, les réseaux sociaux, avec facebook
notamment.
Facebook est arrivé en France en 2008. Avec environ 19 millions d’utilisateurs
– 31%, seulement, des Français – ce site est devenu incontournable chez les
ados et les jeunes adultes.
Julie, Rachida, Yannis, Myriam et Grégory racontent comment ils s’en servent –
ou pas.
La discussion est plutôt animée !
Transcription:
M: Myriam / G: Grégory / R: Rachida / J: Julie / Y: Yannis / A: Anne
A: Bonjour à tous.
Tous: Bonjour.
A: Alors, est-ce que vous avez tous un compte facebook ?
Tous: Oui / Non.
A: Oui ? On est combien, là ? Vous êtes cinq… Trois, quatre, cinq. Donc
cinq comptes facebook ?
M: Non, j’en ai pas. (1)
G: Cinq comptes ? Non, quatre.
M: Je trouve pas ça intéressant.
A: Bon, alors quatre comptes facebook et une anti-facebook. Alors,
pourquoi, Myriam ?
G: Et… et un compte inactif.
M: Ben, j’aime pas raconter, en fait, ma vie. J’aime pas que les gens
sachent… ma vie, avec qui je parle.
A: Mais vous en avez jamais eu ou… ?
M: Non, jamais, jamais.
A: Vous avez pas essayé.
M: Non.
A: D’accord. Donc c’est le refus total.
M: Voilà.
A: Et Grégory, lui, il en a un mais…
G: Ben, moi, je ressens pas véritablement un besoin de… d’utiliser
facebook, bien que ça m’a permis (2) de retrouver quelques copains. Mais bon,
je trouve que c’est une perte de temps, donc j’ai arrêté, parce que c’est…
A: Oui, c’est ça. Pourquoi ? On y passe beaucoup de temps ?
G: C’est des redondances (3), toujours la même chose et voilà. Donc j’ai
arrêté.
A: Bon.
G: C’est… c’est une perte de temps. C’est inutile.
A: Mais vous le gardez quand même au cas où…
G: Oui, voilà, au cas où.
A: … quelqu’un veut vous contacter ?
G: Voilà, bon, c’est ça.
A: D’accord.
G: Exactement.
A: Bon, et les autres, alors ?
R: Bah, moi, j’en ai un. J’y vais de temps en temps. Ça me permet…
A: Elle rit parce qu’en fait, c’est pas de temps en temps ?
M: C’est pas vrai ! C’est pas vrai. Elle y va très, très souvent !
Y: Rachida est une accro (4)…
R: Non, c’est pas vrai ! En fait, je fais comme Grégory. J’en ai un. Ce…
C’est bien parce que ça me permet de… de garder le lien avec ma famille.
M: Voir les potins (5).
R: Voir les potins.
J: Oui, ça c’est vrai que des fois, c’est rigolo (6).
R: Garder le lien avec ma famille, mes amis.
A: Ah oui ? Parce que la famille est sur Facebook aussi ?
R: Oui.
A: Mais qui, la famille ? Les parents ?
R: La famille un peu. Ma famille du Maroc. Surtout mon oncle. Après,
j’ai mes frères et… mes frères et soeurs, qui sont pas forcément chez moi. Et
après, j’ai des amis aussi d’enfance ou des amis qui étaient avec moi au lycée.
Et comme on est partis étudier dans des villes différentes, bah, ça permet de…
de rester un peu en relation aussi.
A: Oui, oui. C’est quoi ? Vous regardez les photos ?
R: Oui, elles aussi, certaines… Enfin, elles mettent pas toutes des
photos non plus parce que , enfin, on est un peu d’accord sur ce point de pas
mettre toute sa vie dedans, enfin sur Facebook. Je trouve que c’est pas…
A: D’accord. Vous limitez un peu.
R: Voilà. Moi personnellement, j’ai pas de photos. Ma page d’entrée,
c’est des petits canards, quoi. Enfin… Deux petits canards. Donc… non, je mets
pas de photos.
A: D’accord. Mais vous avez combien d’amis sur Facebook ?
R: D’amis ? Je dois en avoir 54.
A: Ah, quand même !
G: J’en ai deux.
Y: C’est pas beaucoup, 54.
J: C’est vrai. Comparé à certains…
R: Certains, ils en ont…
A: Julie, Julie, combien vous en avez ?
J: J’en ai pas loin de 200 (7).
A: Et alors, vous mettez quoi, vous ?
J: Je regarde de temps en temps les gens ce qu’ils mettent (8). C’est
plus… Enfin, passé un temps, je m’en servais beaucoup pour… ben pour dire de
temps en temps des banalités: par exemple, bah, "J’ai lavé ma voiture.
Elle est toute propre. Trop bien (8)", quoi. Bon…
A: Ah oui ?
J: Non mais c’est l’humeur du moment qui passait. Et au fur et à mesure,
il y a des gens avec qui, bah, je m’entendais plus, et avec qui je voulais plus
avoir de relations. Donc je me suis restreinte sur ce que j’écrivais parce que
je voulais pas qu’ils sachent ce que je faisais. Et même sur les photos, ça
fait… ça doit faire un an que j’ai pas mis de photos non plus.
A: Mais on peut choisir à qui on les montre.
J: Oui, oui, on peut choisir. Mais après, bon, il y a des amis en commun
qui font que… Bah des fois, je fais attention à ce que… à ce que j’écris.
A: Oui, c’est ça, par un autre biais, quoi. Pas par le compte direct
mais par des photos de ph[...] Enfin des… des comptes d’amis et tout ça.
J: Ouais.
A: D’accord. Donc vous êtes un peu… C’est un peu la désillusion par
rapport à l’usage qu’on peut en faire.
J: Après, parce que ben, ils ont rien à faire vraiment de la journée. Et
il y en a, c’est de temps en temps pour donner un petit potin, comme ça. Et…
mais des fois, il y a… On peut apprendre des trucs, ça, c’est vrai, sur, bah,
sur ce qui se passe sur les gens. Et c’est rigolo.
A: Oui, oui. D’accord.
M: Mais c’est un peu risqué aussi, parce que après, plus tard, les
employeurs, ils peuvent regarder nos photos, les amis.
G: Mais c’est sécurisé.
M: Mais non, parce que la dernière fois, j’ai vu un reportage, en fait,
ils vendent…. Facebook, ils vendent les informations…
R: Les bases de données.
Y: C’est les Américains.
J: Même en France.
M: Même en France, hein.
G: Oui, mais qui c’est-ce qui le fait, ça ?
M: C’est facebook qui vend aux autres entreprises, à l’employeur.
A: Bah la confidentialité, c’est un problème sur Facebook quand même,
quoi, de toute façon. Et vous avez bien vu, là, que… c’est quand ? C’est l’an
dernier, là, il fallait choisir des tas de choses (10).Enfin, il y avait plein
de réglages à faire si on voulait pas que tout le monde ait accès à tout… Mais
c’est…
Y: Oui, parce qu’ils estiment que si… si on bloque pas, en fait, ils ont
le droit de le…
A: Voilà.
Y: … de faire ce qu’ils veulent. Donc…
A: Oui, oui. Oui, oui, c’est ça le principe au départ donc… Et vous, ça
vous embête (11), Yannis, alors ?
Y: Bah moi, j’ai… j’ai rien en fait. J’ai… Il y a… il y a mon nom, il y
a où je suis en ce moment et…
A: Un canard !
Y: Y a pas… Non ! Non, il y a une photo de moi.
A: Ah bon.
Y: Bien habillé et tout. Mais je veux dire, il y a pas ma date de naissance,
où je suis né, etc… des trucs comme ça, je les ai pas mis.
G: Mais tu as dit… tu as dit si c’était un homme ou une femme ?
Y: Oui, non mais ça, il y a la photo, donc normalement, ça se devine
(12) !
G: Ah, tu as mis ta photo.
Y: Oui, et normalement…
G: Parce que moi, j’ai mis une photo de montagne. Donc on sait pas ce
que c’est. Des blocs de pierre…
J: Non mais attends (13), Grégory, excuse-moi, c’est pas tellement un
prénom de fille !
A: Alors, pourquoi vous en avez un ?
Y: Ben moi, je m’en sers essentiellement pour garder contact avec les
gens de… de Strasbourg où j’habitais avant.
A: Ah oui.
Y: Donc… Mais en fait, je regarde si il y des… des événements
importants. Des fois, ils… il mettent si ils ont eu le permis, si ils ont une
école, si ils ont eu le concours (14), tout ça. Sinon…
A: D’accord. Mais vous, vous mettez rien ?
Y: Moi, je mets rien. Je mets juste, voilà, que…
A: Il est juste voyeur !
Y: J’ai… j’ai… Les deux derniers trucs que j’ai mis, c’était que… J’ai
même pas mis que j’ai eu mon permis. Et j’ai juste mis que je… que je stressais
pour le concours quand même, sinon, je… je mets rien, quoi.
J: Oui, enfin… Bref ! (15)
J: Julie n’est pas d’accord !
J: Non, pas tout à fait, non.
Y: J’ai rien mis dessus.
J: Oui, c’est ça ! (16)
A: Bon, on va pas entrer dans les détails, hein. Bon, et vous trouvez
que c’est… sinon, c’est une perte de temps ? Enfin, ça prend beaucoup de temps
? Vous connaissez des gens qui y passent beaucoup, beaucoup de temps ?
J: Ah oui, il y en a qui passent [beaucoup] de temps.
Y: En fait, c’est pas une perte de temps, dans le sens où, si on
l’utilise normalement. Mais après, se connecter pour dire que…
A: C’est un peu…
Y: Moi, je connais des gens qui se connectent pour dire que, en ce
moment, ils sont en cours…
A: Oui.
R: Ils s’ennuient.
Y: Tout… tout le monde s’en fiche (17), quoi, en fait !
A: Oui, oui, c’est ça, ouais. Ça devient tellement banal que c’est…
Y: Pour dire que: "Hier, enfin, il y a une heure, on a bu de
l’eau." Voilà. Tout le monde s’en fout (18), quoi !
M: J’ai mangé une pomme !
A: Vous êtes très critique !
Quelques explications:
1. j’en ai pas: forme orale de "Je n’en ai pas".
2. bien que : normalement suivi du subjonctif. Grégory aurait dû
dire: "Bien que ça m’ait permis…"
3. une redondance: une répétition
4. accro: elle ne peut pas s’en passer. (familier). On dit: Elle
est accro à facebook.
5. les potins: les petites histoires qu’on se raconte sur les
gens, pas toujours très vraies. Des commérages.
6. rigolo: amusant, drôle. (familier)
7. pas loin de 200: presque deux cents.
8. Je regarde les gens ce qu’ils mettent: phrase très orale. La
phrase correcte (et écrite) serait: "je regarde ce que les gens
mettent."
9. trop bien: super / génial. Cette expression est devenue à la
mode chez les jeunes surtout. (familier)
10. des tas de choses: beaucoup de choses. (familier)
11. ça vous embête ? = c’est un problème pour vous ? / Est-ce que
ça vous ennuie ? (plutôt familier)
12. ça se devine: on peut le deviner (grâce au prénom)
13. Non mais attends: on dit ça quand on n’est pas vraiment
d’accord avec ce que quelqu’un a dit et qu’on veut le lui faire remarquer.
14. avoir un concours: réussir les examens d’entrée dans une
grande école, une école de commerce. (Il faut être classé dans les premiers
pour être admis.)
15. Oui, enfin… Bref ! : c’est une façon de dire "Je ne vais
pas tout vous dire / je ne vais pas vous donner tous les détails, mais ce qu’il
raconte ne correspond pas bien à la réalité !"
16. Oui, c’est ça: on peut dire ça, avec ce ton, pour montrer
qu’on n’est vraiment pas d’accord avec ce que quelqu’un vient d’affirmer. (Le
ton est important, pour montrer qu’on est ironique.)
17. Tout le monde s’en fiche: ça n’intéresse personne. (familier)
18. Tout le monde s’en fout: c’est comme "tout le monde s’en
fiche", mais en moins poli. (Très familier, et péjoratif). Un verbe neutre
serait: "Tout le monde s’en moque."