où on va 43-54 ; à discuter oralement :

43. Comment est leur couple ? Qu’est-ce qui se passe ? Vems fel är det ?

Finns det tjejer han är intresserad av ? Förklara!

Vad är IMP?

Det fungerar med en tjej. Berätta !

44.Fåglar ? Vad uttrycker författaren för känslor om sina barn här ? Vad tycker du? Ge några exempel från texten. Vilket verb kommer de aldrig att kunna böja i presens ?

45.Ger han gärna pengar till handikappade barn när man frågar honom på gatan ? Förklara!

46. Qu’est-ce que c’est Antivol ? L’auteur, qu’est-ce qu’il a fait ?

47.Quel temps fait-il ?

Qu’est-ce que c’est une grenouillère ? accrocher=hänga upp ; à l’envers

Quelle blague fait-il à Josée ? Que répond-elle ?

 

48. Comment sont ses enfants sentimentalement ? Qu’est-ce qui se passe dans les magasins ? Comment réagissent les gens ?

Que veulent-ils faire au zoo ?

Comment réagissent les chats et pourquoi ? lutin

49. Qu’est-ce que c’est une marionnette ?

Ses enfants qu’est-ce qu’ils ont dans leur tête à son avis ?

Le père est content parce que Mathieu lit un livre ! Expliquez !

50.Qu’avez-vous compris de ce chapitre ? Qu’est-ce que c’est le Hara-Kiri ? Expliquez : Cette année, le major de Polytechnique est un garçon1

De qui veut-il se moquer ?

51. Comment va Mathieu ? Quel est le problème ? Et le corset ? Quel âge a-t-il maintenant ?

Pourquoi le père s’imagine-t-il Mathieu avec des miroirs aux chaussures ?

52. Il se passe des choses graves dans ce chapitre ! Essayez d’expliquer cette page. De quoi parle le père ? Le petit garçon va à l’école ? Pourquoi ? Il est grand ? Quel âge a-t-il ? Combien pèse-t-il ? Où est-ce qu’on le pèse ? Pourquoi va-t-il chez l’horloger ?

Pourquoi ce chapitre ? Que voulait l’écrivain à votre avis ?

 

53.Quel est le thème de la page 53 ? Qu’en pensez-vous ?

54.Ils vont se rencontrer tous les trois un jour ! Où ? Qui va-t-on aussi rencontrer ? Pourquoi n’aurait-il pas peur de rouler vite ? Quel est le sentiment qu’exprime l’écrivain dans ce chapitre ? Qu’espère le père ?

 

 

43.

 

La mère de mes enfants, que j’ai poussée à bout, en a eu marre, elle m’a quitté. Elle est partie rire ailleurs. Bien fait pour moi. Je ne l’ai pas volé.

Je me retrouve seul, paumé.

J’aimerais bien retrouver une belle jeunesse. J’imagine mon annonce matrimoniale :

 

« Adolescent, 40 ans, 3 enfants dont 2 handicapés, cherche JF cultivée, jolie, sens de l’humour. »

Il va lui en falloir beaucoup, surtout du noir.

J’ai rencontré quelques mignonnes un peu sottes. Je me suis bien gardé de parler de mes enfants, sinon elles se seraient sauvées.

Je me souviens d’une blonde qui savait que j’avais des enfants, mais elle ne savait pas dans quel état. Je l’entends encore me dire : « Quand est-ce que tu me présentes à tes enfants, on dirait que tu ne veux pas, tu as honte de moi ? »

À l’IMP où sont placés Mathieu et Thomas, il y a de jeunes monitrices, notamment une grande brune très belle. Ce serait évidemment l’idéal, elle connaît mes enfants et leur mode d’emploi.

Finalement, ça n’a pas marché. Elle a dû se dire : « Les handicapés, ça va la semaine, c’est mon job, mais s’il faut en plus les retrouver le week-end… » Et peut-être aussi que je n’étais pas à son goût et qu’elle se disait : « Celui-là, il est spécialisé dans l’enfant handicapé, il est capable de m’en faire un, alors non merci. »

Et puis, un jour, il était une fois une fille charmante, cultivée, avec le sens de l’humour. Elle s’est intéressée à moi et à mes deux petits mioches. On a eu beaucoup de chance, elle est restée. Grâce à elle, Thomas a appris à ouvrir et fermer une fermeture Éclair. Pas longtemps. Le lendemain, il ne savait déjà plus, il avait tout oublié, il fallait recommencer l’apprentissage à zéro.

Avec mes enfants, on ne craint jamais de se répéter, ils oublient tout. Avec eux, jamais de lassitude, ni d’habitude, ni d’ennui. Rien ne se démode, tout est nouveau.

 

44.

 

Mes petits oiseaux, je suis bien triste de penser que vous ne connaîtrez pas ce qui, pour moi, a fait les plus grands moments de ma vie.

Ces moments extraordinaires où le monde se réduit à une seule personne, qu’on n’existe que pour elle et par elle, qu’on tremble quand on entend ses pas, qu’on entend sa voix, et qu’on défaille quand on la voit. Qu’on a peur de la casser à force de la serrer, qu’on s’embrase quand on l’embrasse et que le monde autour de nous devient flou.

Vous ne connaîtrez jamais ce délicieux frisson qui vous parcourt des pieds à la tête, fait en vous un grand chambardement, pire qu’un déménagement, une électrocution, ou une exécution. Vous chamboule, vous tourneboule et vous entraîne dans un tourbillon qui fait perdre la boule et donne la chair de poule. Vous remue tout l’intérieur, vous donne chaud à la gueule, vous fait rougir, vous fait rugir, vous hérisse le poil, vous fait bégayer, vous fait dire n’importe quoi, vous fait rire et aussi pleurer.

Parce que, hélas, mes petits oiseaux, vous ne saurez jamais conjuguer à la première personne du singulier et à l’indicatif du présent le verbe du premier groupe : aimer.

 

45.

 

Quand on me demande dans la rue un don pour les enfants handicapés, je refuse.

Je n’ose pas dire que j’ai deux enfants handicapés, on va croire que je blague. L’air dégagé et souriant, je m’offre le luxe de dire : « Les enfants handicapés,

j’ai déjà donné. »

 

46.

 

Je viens d’inventer un oiseau. Je l’ai appelé Antivol, c’est un oiseau rare. Il n’est pas comme les autres. Il a le vertige. C’est pas de pot pour un oiseau. Mais il a le moral. Au lieu de s’attendrir sur son handicap, il en plaisante.

Chaque fois qu’on lui demande de voler, il trouve toujours une raison amusante pour ne pas le faire et il fait rire tout le monde. En plus, il a du culot, il se moque des oiseaux qui volent, les oiseaux normaux.

Comme si Thomas et Mathieu se moquaient des enfants normaux qu’ils croisent dans la rue.

Le monde à l’envers.

 

47.

 

Il pleut, Josée est rentrée plus tôt de promenade avec les enfants, elle est en train de faire manger Mathieu.

Je ne vois pas Thomas. Je sors de la pièce. Dans le couloir, au portemanteau, il y a sa grenouillère accrochée, elle est encore gonflée, elle garde la forme d’un corps. Je rentre dans la pièce l’air sévère.

« Josée, pourquoi vous avez accroché Thomas au portemanteau ? » Elle me regarde sans comprendre.

Je continue mon gag : « Ce n’est pas parce que c’est un enfant handicapé qu’il faut l’accrocher au portemanteau. »

Josée ne s’est pas démontée, elle m’a répondu : « Je le laisse sécher un moment, monsieur, il était trempé. »

48.

 

Mes enfants sont très affectueux. Dans les magasins, Thomas veut embrasser tout le monde, les jeunes, les vieux, les riches, les pauvres, les prolos, les aristos, les Blancs, les Noirs, sans discrimination.

Les gens sont un peu gênés quand ils voient un gamin de douze ans se précipiter sur eux pour les embrasser. Certains reculent, d’autres se laissent faire et disent après, en s’essuyant le visage avec leur mouchoir : « Comme il est gentil ! »

C’est vrai, ils sont gentils. Ils ne voient le mal nulle part, comme les innocents. Ils sont d’avant le péché originel, du temps où tout le monde était bon, la nature bienveillante, tous les champignons comestibles et où l’on pouvait caresser les tigres sans danger.

 

Quand ils vont au zoo, ils veulent faire des baisers aux tigres. Quand ils tirent la queue du chat, étrangement, le chat ne les griffe pas, il doit se dire : « Ce sont des handicapés, il faut être indulgent, ils n’ont pas toute leur tête. »

 

Est-ce qu’un tigre réagirait de la même façon si Thomas et Mathieu lui tiraient la queue ?

Je vais essayer, mais je préviendrai le tigre avant.

 

49.

 

Quand je me promène avec mes deux garçons, j’ai l’impression d’avoir au bout des bras des marionnettes ou des poupées de chiffon. Ils sont légers, ils ont des petits os fragiles, ils ne grandissent pas, ils ne grossissent pas, à quatorze ans ils en paraissent sept, ce sont des petits lutins. Ils ne s’expriment pas en français, ils parlent le lutin, ou bien ils miaulent, ils rugissent, ils aboient, ils piaillent, ils caquettent, ils jacassent, ils couinent, ils grincent. Je ne les comprends pas toujours.

Qu’est- ce qu’il y a dans la tête de mes lutins ? Il n’y a pas de plomb. En dehors de la paille, il ne doit pas y avoir grand -chose, au mieux une cervelle d’oiseau, ou un bric-à-brac genre poste à galène ou un ancien poste de radio hors d’usage. Quelques fils électriques mal soudés, un transistor, une petite ampoule vacillante qui s’éteint souvent, et quelques mots enregistrés qui tournent en boucle.

Pas étonnant qu’avec ce cerveau, ils ne soient pas très performants. Ils ne feront jamais Polytechnique, c’est bien dommage, j’aurais tellement été fier, moi qui ai toujours été nul en maths.

Récemment, j’ai eu une grande émotion. Mathieu était plongé dans la lecture d’un livre. Je me suis approché, tout ému.

Il tenait le livre à l’envers.

 

50.

 

J’ai toujours adoré Hara-Kiri. Un moment, je voulais leur proposer une couverture. Je voulais emprunter à mon frère, élève à Polytechnique, son grand uniforme avec le bicorne pour le mettre à Mathieu, et le prendre en photo. J’avais pensé à la légende : « Cette année, le major de Polytechnique est un garçon1. »

 

Pardon, Mathieu. Ce n’est pas de ma faute si j’avais ces idées tordues. Je n’avais pas envie de me moquer de toi, c’est peut-être de moi que je voulais me moquer. Prouver que j’étais capable de rire de mes misères.

 

1 L’année précédente, pour la première fois le major avait été une fille, Anne Chopinet.

 

51.

 

Mathieu est de plus en plus voûté. Les kinés, le corset en métal, rien n’y fait. À quinze ans, il a la silhouette d’un vieux paysan qui a passé sa vie à bêcher la terre. Quand on le promène, il ne voit que ses pieds, il ne peut même plus voir le ciel.

Un moment, j’ai imaginé fixer sur le bout de ses chaussures des petits miroirs, comme des rétroviseurs qui lui refléteraient le ciel…

Sa scoliose a augmenté, elle va bientôt provoquer des ennuis respiratoires. Une opération sur la colonne vertébrale doit être tentée.

Elle est tentée, il est totalement redressé. Trois jours plus tard, il meurt droit.

 

Finalement, l’opération qui devait lui permettre de voir le ciel a réussi.

 

52.

 

Mon petit garçon est mignon, il rit toujours, il a des petits yeux noirs et brillants, comme les rats.

J’ai souvent peur de le perdre. Il mesure deux centimètres de haut. Pourtant, il a dix ans.

Quand il est né, on a été surpris, un peu inquiets. Le docteur nous a tout de suite rassurés, il a dit : « Il est tout à fait normal, patientez, c’est un petit retard, il va grandir. » On patiente, on s’impatiente, on ne le voit pas grandir.

Dix ans plus tard, l’entaille qu’on a faite dans la plinthe pour marquer sa taille quand il avait un an est toujours valable.

Aucune école n’a accepté de le prendre sous prétexte qu’il n’est pas comme les autres. On est obligés de le garder à la maison. On a dû engager quelqu’un à domicile. C’est très difficile de trouver quelqu’un qui accepte. C’est beaucoup de soucis et de responsabilités, il est si petit, on a peur de le perdre.

Surtout qu’il est très farceur, il adore se cacher et il ne répond pas quand on l’appelle. On passe son temps a le chercher, il faut vider toutes les poches des vêtements et chercher dans tous les tiroirs, ouvrir toutes les boîtes. La dernière fois, il s’était caché dans une boîte d’allumettes.

Faire sa toilette est difficile, on a toujours peur qu’il se noie dans sa cuvette. Ou qu’il file par la vidange du lavabo. Le plus dur, c’est de lui couper les ongles.

Pour connaître son poids, on doit aller à La Poste le mettre sur un pèse-lettre. Récemment, il a eu une rage de dents. Aucun dentiste n’a voulu le soigner, j’ai

dû l’emmener chez l’horloger.

Chaque fois que des parents ou des amis le voient, ils disent : « Comme il a grandi. » Je ne les crois pas, je sais bien qu’ils disent ça pour nous faire plaisir.

Un jour, un médecin plus courageux que les autres nous a dit qu’il ne grandirait jamais. Le coup a été dur.

Petit à petit, on s’est habitués, on a vu les avantages.

On peut le garder sur nous, on l’a toujours sous la main, il n’est pas encombrant, on se le met vite dans la poche, il ne paie pas dans les transports en commun, et surtout il est affectueux, il adore nous chercher des poux dans la tête.

Un jour, on l’a perdu.

J’ai passé la nuit à soulever les feuilles mortes, une a une. C’était l’automne.

C’était un rêve.

 

53.

 

Il ne faut pas croire que la mort d’un enfant handicapé est moins triste. C’est aussi triste que la mort d’un enfant normal.

Elle est terrible la mort de celui qui n’a jamais été heureux, celui qui est venu faire un petit tour sur Terre seulement pour souffrir.

De celui-là, on a du mal à garder le souvenir d’un sourire.

 

54.

 

Il paraît qu’on va se retrouver un jour, tous les trois.

Est-ce qu’on va se reconnaître ? Comment vous serez ? Comment vous serez habillés ? Je vous ai toujours connus en salopette, peut-être que vous serez en costume trois-pièces, ou en aube blanche comme les anges ? Peut-être que vous aurez une moustache ou une barbe, pour faire sérieux ? Est-ce que vous aurez changé, est-ce que vous aurez grandi ?

Est-ce que vous allez me reconnaître ? Je risque d’arriver en très mauvais état. Je n’oserai pas vous demander si vous êtes toujours handicapés… Est-ce que ça existe les handicapés, au Ciel ? Peut-être que vous serez devenus comme les

autres ?

Est-ce qu’on va pouvoir enfin se parler d’homme à homme, se dire des choses essentielles, des choses que je n’ai pas pu vous dire sur Terre parce que vous ne compreniez pas le français et que moi, je ne parlais pas le lutin ?

Au Ciel, on va peut-être enfin se comprendre. Et puis, surtout, on va retrouver votre grand-père. Celui dont je n’ai jamais pu vous parler, et que vous n’avez jamais connu. Vous allez voir, c’était un personnage étonnant, il va certainement vous plaire et vous faire rire.

Il va nous emmener faire des virées dans sa traction, il va vous faire boire, là-haut on doit boire de l’hydromel.

Il va rouler vite avec sa voiture, très vite, trop vite. On n’a pas peur. On n’a rien à craindre, on est déjà morts.