Testament de Napoléon Bonaparte
17 mars 1821
Ceci est mon testament ou acte de ma
dernière volonté
1 - Je meurs dans la religion
apostolique et romaine, dans le sein de laquelle je suis né, il y a plus de
cinquante ans.
2 - Je désire que mes cendres reposent
sur les bords de la Seine, au milieu de ce peuple français que j'ai tant aimé.
3 - J'ai toujours eu à me louer de ma
très chère épouse Marie-Louise ; je lui conserve jusqu'au dernier moment les
plus tendres sentiments ; je la prie de veiller pour garantir mon fils des
embûches qui environnent encore son enfance.
4 - Je recommande à mon fils de ne
jamais oublier qu'il est né prince français, et de ne jamais se prêter à être
un instrument entre les mains des triumvirs qui oppriment les peuples de
l'Europe. Il ne doit jamais combattre, ni nuire en aucune autre manière à la
France , il doit adopter ma devise : Tout pour le peuple français.
5 - Je meurs prématurément, assassiné
par l'oligarchie anglaise et son sicaire ; le peuple anglais ne tardera pas à
me venger.
6 - Les deux issues si malheureuses des
invasions de la France, lorsqu'elle avait encore tant de ressources, sont dues
aux trahisons de Marmont, Augereau, Talleyrand et La Fayette. Je leur pardonne
; puisse la postérité française leur pardonner comme moi.
7 - Je remercie ma bonne et très
excellente mère, le Cardinal, mes frères Joseph, Lucien, Jérôme, Pauline,
Caroline, Julie, Hortense, Catarine, Eugène, de l'intérêt qu'ils m'ont conservé
; je pardonne à Louis le libelle qu'il a publié en 1820 : il est plein
d'assertions fausses et de pièces falsifiées.
8 - Je désavoue le Manuscrit de
Sainte-Hélène et autres ouvrages sous le titre de Maximes, Sentences, etc...
que l'on s'est plu à publier depuis six ans : ce ne sont pas là les règles qui
ont dirigé ma vie. J'ai fait arrêter et juger le duc d'Enghien, parce que cela
était nécessaire à la sûreté, à l'intérêt et à l'honneur du peuple français, lorsque
le comte d'Artois entretenait, de son aveu, soixante assassins à Paris. Dans
une semblable circonstance, j'agirais encore de même.
II
1 - Je lègue à mon fils les boîtes,
ordres, et autres objets tels qu'argenterie, lits de camp, armes, selles,
éperons, vases de ma chapelle, livres, linge qui a servi à mon corps et à mon
usage, conformément à l'état annexé, côté (A). Je désire que ce faible legs lui
soit cher, comme lui retraçant le souvenir d'un père dont l'univers
l'entretiendra.
2
- Je lègue à lady Holland le camée antique que le pape Pie VI m'a donné à
Tolentino.
3 - Je lègue au comte Montholon deux
millions de francs comme une preuve de ma satisfaction des soins filiaux qu'il
m'a rendus depuis six ans, et pour l'indemniser des pertes que son séjour à
Sainte-Hélène lui a occasionnées.
4 - Je lègue au comte Bertrand cinq
cent mille francs.
5 - Je lègue à Marchand, mon premier
valet de chambre, quatre cent mille francs. Les services qu'il m'a rendus sont
ceux d'un ami. Je désire qu'il épouse une veuve, soeur, ou fille d'un officier
ou soldat de ma vieille garde.
6 - Idem, à Saint-Denis, cent mille
francs.
7 - Idem, à Novarre (Noverraz), cent
mille francs.
8 - Idem, à Pierron, cent mille francs.
9 - Idem, à Archambault, cinquante
mille francs,
10 - Idem, à Coursot, vingt-cinq mille
francs.
11 - A Chandelier, vingt-cinq mille
francs.
12 - A l'abbé Vignali, cent mille
francs. Je désire qu'il bâtisse sa maison près de Ponte Nuovo di Rostino.
13 - Idem, au comte Las Cases, cent
mille francs.
14 - Idem, au comte Lavalette, cent
mille francs.
15 - Idem, au chirurgien en chef
Larrey, cent mille francs. C'est l'homme le plus vertueux que j'aie connu.
16 - Idem, au général Brayer, cent
mille francs.
17 - Idem, au général
Lefebvre-Desnouettes, cent mille francs.
18 - Idem, au général Drouot, cent
mille francs.
19 - Idem, au général Cambronne, cent
mille francs.
20 - Idem, aux enfants du général
Mouton-Duvernet, cent mille francs.
21 - Idem, aux enfants du brave
Labédoyère, cent mille francs.
22 - Idem, aux enfants du général
Girard, tué à Ligny, cent mille francs.
23 - Idem, aux enfants du général Chartrand, cent mille francs.
24 - Idem, aux enfants du vertueux
général Travot, cent mille francs.
25 - Idem, au général Lallemand l'aîné,
cent mille francs.
26 - Idem, au comte Réal, cent mille
francs.
27 - Idem, à Costa de Bastelica en
Corse, cent mille francs.
28 - Idem, au général Clauzel, cent
mille francs.
29 - Idem, au baron Méneval, cent mille
francs.
30 - Idem, à Arnault, auteur de Marius,
cent mille francs.
31 - Idem, au colonel Marbot, cent
mille francs. Je l'engage à continuer à écrire pour la défense de la gloire des
armées françaises, et à en confondre les calomniateurs et les apostolats.
32 - Idem, au baron Bignon, cent mille
francs. Je l'engage à écrire l'histoire de la diplomatie française de 1792 à
1815.
33 - Idem, à Poggi di Talavo, cent
mille francs.
34 - Idem, au chirurgien Emmery, cent
mille francs.
35 - Ces sommes seront prises sur les
six millions que j'ai placés en partant de Paris en 1815, et sur les intérêts à
raison de cinq pour cent depuis juillet 1815. Les comptes en seront arrêtés
avec le banquier par les comtes Montholon, Bertrand et Marchand.
36 - Tout ce que ce placement produira
au-delà de la somme de cinq millions six cent mille francs, dont il a été
disposé ci-dessus, sera distribué en gratifications aux blessés de Waterloo, et
aux officiers et soldats du bataillon de l'île d'Elbe, sur un état arrêté par
Montholon, Bertrand, Drouot, Cambronne et le chirurgien Larrey.
37 - Ces legs, en cas de mort, seront
payés aux veuves et enfants, et au défaut de ceux-ci, rentreront à la masse.
III
1 - Mon domaine privé étant ma
propriété, dont aucune loi française ne m'a privé, que je sache, le compte en
sera demandé au baron de la Bouillerie, qui en est le trésorier ; il doit se
monter à plus de deux cent millions de francs ; savoir :
1 - Le portefeuille contenant les économies
que j'ai, pendant quatorze ans, faites sur ma liste civile, lesquelles se sont
élevées à plus de douze millions par an, si j'ai bonne mémoire,
2 - le produit de ce portefeuille,
3 - les meubles de mes palais, tels
qu'ils étaient en 1814 ; les palais de Rome, Florence, Turin compris.Tous ces
meubles ont été achetés des deniers des revenus de la liste civile,
4 - la liquidation de mes maisons
du royaume d'Italie, tels qu'argent, argenterie, bijoux, meubles, écuries ; les
comptes en seront donnés par le prince Eugène et l'intendant de la couronne,
Campagnoni.
2 - Je lègue mon domaine privé, moitié
aux officiers et soldats qui restent de l'armée française, qui ont combattu
depuis 1792 à 1815 pour la gloire et l'indépendance de la nation ; la
répartition en sera faite au prorata des appointements d'activité ; moitié aux
villes et campagnes d'Alsace, de Lorraine, de Franche-Comté, de Bourgogne, de
l'Ile-de-France, de Champagne, Forez, Dauphiné qui auraient souffert par l'une
ou l'autre invasion. Il sera de cette somme prélevé un million pour la ville de
Brienne, et un million pour celle de Mery. J'institue les comtes Montholon,
Bertrand et Marchand mes exécuteurs testamentaires.
Ce présent testament, tout écrit de ma
propre main, est signé et scellé de mes armes.
NAPOLEON
(Sceau)
ETAT JOINT A MON TESTAMENT
Longwood, île de Sainte-Hélène,
le 15 avril 1821
I
1- Les vases sacrés qui ont servi à ma chapelle
à Longwood.
2 - Je charge l'abbé Vignali de les
garder et de les remettre à mon fils quand il aura seize ans.
II
1 - Mes armes, savoir : mon épée, celle
que je portais à Austerlitz, le sabre de Sobieski, mon poignard, mon glaive,
mon couteau de chasse, mes deux paires de pistolets de Versailles.
2 - Mon nécessaire d'or, celui qui m'a
servi le matin d'Ulm, d'Austerlitz, d'Iéna, d'Eylau, de Friedland, de l'île de
Lobau, de la Moskowa et de Montmirail ; sous ce point de vue, je désire qu'il
soit précieux à mon fils. (Le comte Bertrand en est dépositaire depuis 1814.)
3 - Je charge le comte Bertrand de
soigner et conserver ces objets, et de les remettre à mon fils lorsqu'il aura
seize ans.
III
1 - Trois petites caisses d'acajou,
contenant, la première, trente-trois tabatières ou bonbonnières ; la deuxième,
douze boîtes aux armes impériales, deux petites lunettes et quatre boîtes
trouvées sur la table de Louis XVIII, aux Tuileries, le 20 mars 1815 ; la
troisième, trois tabatières ornées de médailles d'argent, à l'usage de
l'Empereur, et divers effets de toilette, conformément aux états numérotés I,
II, III.
2 - Mes lits de camp, dont j'ai fait
usage dans toutes mes campagnes.
3 - Ma lunette de guerre.
4 - Mon nécessaire de toilette, un de
chacun de mes uniformes, une douzaine de chemises, et un objet complet de
chacun de mes habillements, et généralement de tout ce qui sert à ma toilette.
5 - Mon lavabo.
6 - Une petite pendule qui est dans ma
chambre à coucher de Longwood.
7 - Mes deux montres et la chaîne de
cheveux de l'Impératrice.
8 - Je charge Marchand, mon premier
valet de chambre, de garder ces objets, et de les remettre à mon fils lorsqu'il
aura seize ans.
IV
1 - Mon médaillier.
2 - Mon argenterie et ma porcelaine de
Sèvres dont j'ai fait usage à Sainte-Hélène (état B et C).
3 - Je charge le comte Montholon de
garder ces objets et de les remettre à mon fils lorsqu'il aura seize ans.
V
1 - Mes trois selles et brides, mes
éperons, qui m'ont servi à Sainte-Hélène.
2 - Mes fusils de chasse au nombre de
cinq.
3 - Je charge mon chasseur Noverraz de
garder ces objets et de les remettre à mon fils quand il aura seize ans.
VI
1 - Quatre cents volumes choisis dans
ma bibliothèque, parmi ceux qui ont le plus servi à mon usage.
2 - Je charge Saint-Denis de les garder
et de les remettre à mon fils quand il aura seize ans.
NAPOLEON
ETAT (A)
1 - Il ne sera vendu aucun des effets
qui m'ont servi ; le surplus sera partagé entre mes exécuteurs testamentaires
et mes frères.
2 - Marchand conservera mes cheveux, et
en fera faire un bracelet avec un petit cadenas en or, pour être envoyé à
l'Impératrice Marie-Louise, à ma mère et à chacun de mes frères, soeurs,
neveux, nièces, au cardinal, et un plus considérable pour mon fils.
3 - Marchand enverra une de mes paires
de boucles à souliers, en or, au prince Joseph.
4 - Une petite paire de boucles, en or,
à jarretières, au prince Lucien.
5 - Une boucle de col, en or, au prince
Jérôme.
Inventaire de mes effets que Marchand
gardera pour remettre à mon fils.
1 - Mon nécessaire d'argent, celui qui
est sur ma table, garni de tous ses ustensiles, rasoirs, etc.
2 - Mon réveille-matin ; c'est le
réveille-matin de Frédéric II que j'ai pris à Potsdam (dans la boîte n° III).
3 - Mes deux montres, avec la chaîne
des cheveux de l'Impératrice, et une chaîne de mes cheveux pour l'autre montre.
Marchand la fera faire à Paris.
4 - Mes deux sceaux (un de France,
enfermé dans la boîte n° III).
5 - La petite pendule dorée qui est
actuellement dans ma chambre à coucher.
6 - Mon lavabo, son pot à eau et son
pied.
7 - Mes tables de nuit, celles qui me
servaient en France, et mon bidet de vermeil.
8 - Mes deux lits de fer, mes matelas
et mes couvertures, s'ils se peuvent conserver.
9 - Mes trois flacons d'argent où l'on
mettait mon eau-de-vie que portaient mes chasseurs en campagne.
10 - Ma lunette de France.
11 - Mes éperons (deux paires).
12 - Trois boîtes d'acajou, Nos I, II,
III, renfermant mes tabatières et autres objets.
13 - Une cassolette en vermeil.
Linge de toilette :
6 chemises.
6 mouchoirs.
6 cravates.
6 serviettes.
6 paires de bas de soie.
4 cols noirs.
6 paires de chaussettes.
2 paires de draps de batiste.
2 taies d'oreiller.
2 robes de chambre.
2 pantalons de nuit.
1 paire de bretelles.
4 culottes-vestes de casimir blanc.
6 madras.
6 gilets de flanelle.
4 caleçons.
6 paires de guêtres.
1 Petite boîte pleine de mon tabac.
1 boucle de col en or. (Renfermée
dans la petite boîte n° III.)
1 paire de boucles à jarretières en
or (id.).
1 paire de boucles en or à souliers
(id.).
Habillement :
1 uniforme de chasseur.
1 dito grenadier.
1 dito garde nationale.
2 chapeaux.
1 capote grise et verte.
1 manteau bleu (celui que j'avais à
Marengo).
1 zibeline pelisse verte.
2 paires de souliers.
2 paires de bottes.
1 paire de pantoufles.
6 ceinturons.
NAPOLEON
ETAT (B)
Inventaire des effets que j'ai laissés
chez M. le comte de Turenne :
1 sabre de Sobieski.
1 grand collier de la Légion
d'honneur.
1 épée en vermeil.
1 glaive de Consul.
1 épée en fer.
1 ceinturon de velours.
1 collier de la Toison d'Or.
1 petit nécessaire en acier.
1 veilleuse en argent.
1 poignée de sabre antique.
1 chapeau à la Henri IV et une
toque, les dentelles de l'Empereur.
1 petit médaillier.
2 tapis turcs.
2 manteaux de velours cramoisi
brodés, avec vestes et culottes.
1 - Je donne à mon fils le sabre de
Sobieski.
Idem le collier de la Légion d'honneur.
Idem l'épée en vermeil.
Idem le glaive de Consul.
Idem l'épée en fer.
Idem le collier de la Toison d'Or.
Idem le chapeau à la Henri IV et la
toque.
Idem le nécessaire d'or pour les dents,
resté chez le dentiste.
2 - A l'impératrice Marie-Louise, mes
dentelles.
A Madame, la veilleuse en argent.
Au cardinal, le petit nécessaire en
acier.
Au prince Eugène, le bougeoir en
vermeil.
A la princesse Pauline, le petit
médaillier.
A la reine de Naples, un petit tapis
turc.
A la reine Hortense, un petit tapis turc.
Au prince Jérôme, la poignée de sabre
antique.
Au prince Joseph, un manteau brodé,
veste et culotte.
Au prince Lucien, un manteau brodé,
veste et culotte.
NAPOLEON
Ce 24 avril 1821, Longwood.
Ceci est mon codicille, ou acte de ma
dernière volonté.
Sur les fonds remis en or à
l'impératrice Marie-Louise, ma très chère et bien-aimée épouse, à Orléans, en
1814, elle reste me devoir deux millions, dont je dispose par le présent
codicille, afin de récompenser mes plus fidèles serviteurs, que je recommande
du reste à la protection de ma chère Marie-Louise.
1 - Je recommande à l'Impératrice de
faire restituer au comte Bertrand les trente mille francs de rente qu'il
possède dans le duché de Parme, et sur le mont Napoléon de Milan ainsi que les
arrérages échus.
2 - Je lui fais la même recommandation
pour le duc d'Istrie, la fille de Duroc, et autres de mes serviteurs qui me
sont restés fidèles et qui me sont toujours chers ; elle les connaît.
3 - Je lègue, sur les deux millions
ci-dessus mentionnés, trois cent mille francs au comte Bertrand, sur lesquels
il versera cent mille francs dans la caisse du trésorier, pour être employés,
selon mes dispositions, à des legs de conscience.
4 - Je lègue deux cent mille francs au
comte Montholon, sur lesquels il versera cent mille francs dans la caisse du
trésorier, pour le même usage que ci-dessus.
5 - Idem, deux cent mille francs au
comte Las Cases, sur lesquels il versera cent mille francs dans la caisse du
trésorier, pour le même usage que ci-dessus.
6 - Idem, à Marchand, cent mille
francs, sur lesquels il versera cinquante mille francs dans la caisse, pour le
même usage que ci-dessus.
7 - Au maire d'Ajaccio, au commencement
de la Révolution, Jean Jérôme Lévy, ou à sa veuve, enfants ou petits-enfants,
cent mille francs.
8 - A la fille de Duroc, cent mille
francs.
9 - Au fils de Bessières, duc d'Istrie,
cent mille francs.
10 - Au général Drouot, cent mille
francs.
11 - Au comte Lavalette, cent mille
francs.
12 - Idem cent mille francs, savoir :
Vingt-cinq mille francs, à Pierron,
mon maître d'hôtel.
Vingt-cinq mille francs, à
Noverraz, mon chasseur.
Vingt-cinq mille francs, à
Saint-Denis, le garde de mes livres.
Vingt-cinq mille francs à Santini,
mon ancien huissier.
13 - Idem, cent mille francs ; savoir :
Quarante mille francs à Planat, mon
officier d'ordonnance.
Vingt mille francs à Hébert,
dernièrement concierge à Rambouillet, et qui était de ma chambre en Egypte.
Vingt mille francs à Lavigné, qui
était dernièrement concierge d'une de mes écuries, et qui était mon piqueur en
Egypte.
Vingt mille francs à
Jeannet-Dervieux, qui était piqueur des écuries, et me servait en Egypte.
14 - Deux cent mille francs seront
distribués en aumône aux habitants de Brienne-le-Château qui ont le plus souffert.
Les trois cent mille francs restants
seront distribués aux officiers et soldats du bataillon de ma garde de l'île
d'Elbe, actuellement vivants, ou à leurs veuves ou enfants, au prorata des
appointements, et selon l'état qui sera arrêté par mes exécuteurs
testamentaires, les amputés ou blessés grièvement auront le double. L'état en
sera arrêté par Larrey et Emmery.
Ce codicille est écrit tout de ma
propre main, signé et scellé de mes armes.
NAPOLEON
(sceau)
Ce 24 avril 1821, Longwood.
Ceci est mon codicile, ou acte de ma
dernière volonté.
Sur la liquidation de ma liste civile
d'Italie, telle qu'argent, bijoux argenterie, linge, meubles, écuries dont le
vice-roi est dépositaire, et qui m'appartiennent, je dispose de deux millions
que je lègue à mes plus fidèles serviteurs.
J'espère que, sans s'autoriser d'aucune
raison, mon fils Eugène Napoléon les acquittera fidèlement; il ne peut oublier
les quarante millions de francs que je lui ai donnés, soit en Italie, soit par
le partage de la succession de sa mère.
1 - Sur ces deux millions, je lègue au
comte Bertrand trois cent mille francs, dont il versera cent mille francs dans
la caisse du trésorier pour être employés, selon mes dispositions, à l'acquit
de legs de conscience.
2 - Au comte Montholon, deux cent mille
francs, dont il versera cent mille francs à la caisse, pour le même usage que
ci-dessus.
3 - Au comte Las Cases, deux cent mille
francs, dont il versera cent mille francs à la caisse, pour le même usage que
ci-dessus.
4 - A Marchand, cent mille francs, dont
il versera cinquante mille francs à la caisse, pour le même usage que
ci-dessus.
5 - Au comte Lavalette, cent mille
francs.
6 - Au général Hogendorp, Hollandais,
mon aide de camp réfugié au Brésil, cent mille francs.
7 - A mon aide de camp Corbineau,
cinquante mille francs.
8 - A mon aide de camp, Caffarelli,
cinquante mille francs.
9 - A mon aide de camp Dejean,
cinquante mille francs.
10 - A Percy, chirurgien en chef à
Waterloo, cinquante mille francs.
11 - Cinquante mille francs, savoir :
Dix mille francs à Pierron, mon
maître d'hôtel.
Dix mille francs à Saint-Denis, mon
premier chasseur.
Dix mille francs à Noverraz.
Dix mille francs à Coursot, mon
maître d'office.
Dix mille francs à Archambault, mon
piqueur.
12 - Au baron Méneval, cinquante mille
francs.
13 - Au duc d'Istrie, fils de
Bessières, cinquante mille francs.
14 - A la fille de Duroc, cinquante
mille francs.
15 - Aux enfants de Labédoyère,
cinquante mille francs.
16 - Aux enfants de Mouton-Duvernet,
cinquante mille francs.
17 - Aux enfants du brave et vertueux
général Travot, cinquante mille francs.
18 - Aux enfants de Chartrand,
cinquante mille francs.
19 - Au général Cambronne, cinquante
mille francs.
20 - Au général Lefebvre-Desnouettes,
cinquante mille francs.
21 - Pour être répartis entre les
proscrits qui errent en pays étrangers, Français, ou Italiens, ou Belges, ou
Hollandais, ou Espagnol, ou des départements du Rhin, sur l'ordonnance de mes
exécuteurs testamentaires, cent mille francs.
22 - Pour être répartis entre les
amputés ou blessés grièvement de Ligny, Waterloo, encore vivants, sur des états
dressés par mes exécuteurs testamentaires, auxquels seront adjoints Cambronne,
Larrey, Percy et Emmery, il sera donné double à la garde, quadruple à ceux de
l'île d'Elbe, deux cent mille francs.
Ce codicille est écrit entièrement de
ma propre main, signé et scellé de mes armes.
NAPOLEON
(sceau)
Ce 24 avril 1821, à Longwood.
Ceci est un troisième codicille à mon
testament du 15 avril.
1 - Parmi les diamants de la couronne
qui furent remis en 1814, il s'en trouvait pour cinq à six cent mille francs
qui n'en étaient pas, et faisaient partie de mon avoir particulier; on les fera
rentrer pour acquitter mes legs.
2 - J'avais chez le banquier Torlonia
de Rome deux à trois cent mille francs en lettres de change, produits de mes
revenus à l'île d'Elbe, depuis 1816 ; le sieur Peyrusse, quoiqu'il ne fût plus
mon trésorier, et n'eût pas de caractère, a tiré à lui cette somme ; on la lui
fera restituer.
3 - Je lègue au duc d'Istrie trois cent
mille francs dont seulement cent mille francs reversibles à la veuve, si le duc
était mort lors de l'exécution du legs. Je désire, si cela n'a aucun
inconvénient, que le duc épouse la fille de Duroc.
4 - Je lègue à la duchesse de Frioul,
fille de Duroc, deux cent mille francs ; si elle était morte avant l'exécution
du legs, il ne sera rien donné à la mère.
5
- Je lègue au général Rigau, celui qui a été proscrit, cent mille francs.
6 - Je lègue à Boinod, commissaire
ordonnateur, cent mille francs.
7 - Je lègue aux enfants du général
Letort, tué dans la campagne de 1815, cent mille francs.
8 - Ces huit cent mille francs de legs
seront comme s'ils étaient portés à la suite de l'article de mon testament, ce
qui porterait à six millions quatre cent mille francs la somme des legs dont je
dispose par mon testament, sans comprendre les donations faites par mon second
codicille.
Ceci est écrit de ma propre main, signé
et scellé de mes armes.
NAPOLEON
(Sceau)
Ceci est mon troisième codicille à mon
testament, tout entier écrit de ma main, signé et scellé de mes armes. Sera
ouvert le même jour et immédiatement après l'ouverture de mon testament.
NAPOLEON
Ce 24 avril 1821, Longwood.
Ceci est un quatrième codicille à mon
testament.
Par les dispositions que nous avons
faites précédemment, nous n'avons pas rempli toutes nos obligations, ce qui
nous a décidé à faire ce quatrième codicille.
1 - Nous léguons au fils, ou petit-fils
du baron Du Teil, lieutenant général d'artillerie, ancien seigneur de
Saint-André, qui a commandé l'école d'Auxonne avant la Révolution, la somme de
100 000 (cent mille francs) comme souvenir de reconnaissance pour les soins que
ce brave général a pris de nous, lorsque nous étions lieutenant et capitaine
sous ses ordres.
2 - Idem, au fils, ou petit-fils, du
général Dugommier, qui a commandé en chef l'armée de Toulon, la somme de cent
mille francs (100 000) ; nous avons, sous ses ordres, dirigé le siège, et
commandé l'artillerie . c'est un témoignage de souvenir pour les marques
d'estime,d'affection et d'amitié que nous a données ce brave et intrépide
général.
3 - Idem. Nous léguons cent mille
francs (100 000) au fils ou petit-fils du député à la Convention, Gasparin,
représentant du peuple à l'armée de Toulon, pour avoir protégé et sanctionné de
son autorité le plan que nous avons donné, qui a valu la prise de cette ville,
et qui était contraire à celui envoyé par le Comité de Salut Public. Gasparin
nous a mis par sa protection à l'abri des persécutions de l'ignorance des
états-majors qui commandaient l'armée avant l'arrivée de mon ami Dugommier.
4 - Idem. Nous léguons cent mille
francs (100 000) à la veuve, fils ou petit-fils de notre aide de camp Muiron,
tué à nos côtés à Arcole nous couvrant de son corps.
5
- Idem. (10 000) dix mille francs au sous-officier Cantillon, qui a essuyé un
procès comme prévenu d'avoir voulu assassiner lord Wellington, ce dont il a été
déclaré innocent. Cantillon avait autant de droit d' assassiner cet oligarque,
que celui de m'envoyer pour périr sur le rocher de Sainte-Hélène. Wellington,
qui a proposé cet attentat, cherchait à le justifier sur l'intérêt de la
Grande-Bretagne.
Cantillon, si vraiment il eût assassiné
le lord, serait couvert et aurait été justifié par les mêmes motifs, l'intérêt
de la France, de se défaire d'un général qui d'ailleurs avait violé la
capitulation de Paris, et par là s'était rendu responsable du sang des martyrs
Ney, Labédoyère, etc., et du crime d'avoir dépouillé les Musées, contre le texte
des traités.
6 - Ces 410 000 francs (quatre cent dix
mille francs) seront ajoutés aux six millions quatre cent mille francs dont
nous avons disposé, et porteront nos legs à six millions huit cent dix mille
francs ; ces quatre cent dix mille francs doivent ëtre considérés comme faisant
partie de notre testament, article 35, et suivre en tout le même sort que les
autres legs.
7 - Les neuf mille livres sterling que
nous avons données au comte et à la comtesse Montholon, doivent, si elles ont
été soldées, être déduites et portées en compte sur les legs que nous leur
faisons par nos testaments ; si elles n'ont pas été acquittés, nos billets
seront annulés.
8 - Moyennant le legs fait par notre
testament au comte Montholon, la pension de vingt mille francs accordée à sa
femme est annulée ; le comte Montholon est chargé de la lui payer.
9 - L'Administration d'une pareille
succession, jusqu'à son entière liquidation, exigeant des frais de bureau, de
courses, de missions, de consultations, de plaidoiries, nous entendons que nos
exécuteurs testamentaires retiendront trois pour cent sur tous les legs, soit
sur les six millions huit cent mille francs, soit sur les sommes portées dans
les codicilles, soit sur les deux cent millions de francs du domaine privé.
10 - Les sommes provenant de ces
retenues seront déposées entre les mains d'un trésorier, et dépensées sur
mandat de nos exécuteurs testamentaires.
11 - Si les sommes provenant desdites
retenues n'étaient pas suffisantes pour pourvoir aux frais, il y sera pourvu
aux dépens des trois exécuteurs testamentaires et du trésorier, chacun dans la
proportion du legs que nous leur avons fait par notre testament et codicille.
12 - Si les sommes provenant des
susdites retenues sont au-dessus des besoins, le restant sera partagé entre nos
trois exécuteurs testamentaires et le trésorier, dans le rapport de leurs legs
respectifs.
13 - Nous nommons le comte Las Cases et
à son défaut son fils, et à son défaut le général Drouot, trésorier.
Ce présent codicille est entièrement
écrit de notre main, signé et scellé de mes armes.
NAPOLEON
(sceau)
Instructions pour mes exécuteurs
testamentaires.
l - J'entends que mes legs soient payés
dans leur intégrité.
2 - Les 5 280 000 francs que j'ai
placés chez le banquier Laffite devront avoir produit au ler janvier 1822, les
intérêts étant comptés à 5 pour cent, ainsi que je le lui ai dit, environ 7
millions. En cas de difficulté, il faut compter de clerc à maître, puisque des
forces majeures m'ont empêché d'écrire et de disposer de mes fonds ; je
n'entends aucune modification là-dessus.
3 - Je n'ai pas connaissance que le
banquier Laffitte ait payé pour mon compte que :
1 - 100 000 francs au comte Las
Cases,
2 - 20 000 francs au général
Lallemant aîné,
3 - 72 000 francs à Balcombe, sur
une lettre de crédit du comte Bertrand,
4 - 3 000 francs à Gilly, mon valet
de chambre,
5 - une autorisation envoyée par le
canal du prince Eugène, de fournir 12 000 francs par mois, depuis 1817 à
Londres, pour mes besoins. (Cette somme n'a pas été fournie, si ce n'est en
partie chez MM, Parker, ce qui me rend redevable de sommes considérables au
compte
Bertrand, somme dont il doit tout
d'abord être remboursé.) D'où il résulte que le règlement de ce compte doit
porter les fonds que j'ai placés chez lui, à la somme de 6 200 000 francs
capital et intérêts, ou environ, disponible au ler janvier 1822.
4 - La question de mon domaine privé
est une question majeure. Elle sera susceptible de beaucoup de débats ; mais la
restitution de l'argent de Peyrusse, qui a été versé à la couronne, à ce que je
crois ; mais la liquidation de ma liste civile d'Italie, d'où il doit me
revenir plusieurs millions ; mais la rentrée des meubles existants à la
couronne et qui m'appartiennent, avant l'institution de la liste civile, du
temps du consulat, et même lorsque j'étais général (dans le premier cas, sont
tous les meubles de Saint-Cloud, une partie de ceux des Tuileries ; dans le
second cas, sont en grande partie des meubles de Rambouillet) ; mais les
présents reçus soit des souverains, soit de la ville de Paris, tels que les
beaux meubles de malaquite de Russie, les lustres, les cristaux, etc. ; mais le
service d'or de la ville de Paris, sont une question particulière ; ces divers
objets doivent avoir une valeur de plusieurs millions.
5 - Quant à tous les meubles de la
couronne, qui m'appartiennent, comme ayant été achetés des deniers des revenus
de la liste civile, on opposera que, par un sénatus-consulte, les héritiers de
l'Empereur ne pouvaient en hériter que lorsque leur valeur dépassait 30
millions de francs ; mais l'on ne pourrait, sans injustice, ne pas considérer
ces meubles comme ma propriété.
6 - Lacken a été acheté des deniers du
domaine extraordinaire, mais les meubles ont été payés par les deniers ou
domaine privé. Cela forme un article de 800 000 francs qui doivent être
réclamés au roi des Pays-Bas.
7 - Lorsque le roi de Sardaigne et le
grand duc de Toscane furent chassés de leurs Etats en 1799, ils emportèrent
leur argenterie, leurs bijoux et autres effets précieux ; on leur conserva même
leurs domaines particuliers. De quel droit ces souverains prétendraient-ils
garder mon
argenterie et les meubles que j'ai
envoyés de Paris, et qui ont été achetés des deniers de ma liste civile !
8 - Le pape a emporté de Rome son
argenterie et ses objets précieux ; l'argenterie et les meubles que j'ai
envoyés à Rome, et qui ont été payés des deniers de ma liste civile,
m'appartiennent de droit.
9 - J'avais à l'île d'Elbe une petite
métairie appelée Saint-Martin, estimée 200 000 francs, avec meubles, voitures,
etc., cela avait été acheté des deniers de la princesse Pauline ; si on le lui
a remis, je suis satisfait ; mais si on ne l'a pas fait, mes exécuteurs
testamentaires doivent en poursuivre la remise en faveur de la princesse
Pauline, si elle vit, et qui rentrera à la masse de ma succession, si elle ne
vit plus alors.
10 - J'avais à Venise 5 millions de
vif-argent qui ont été, je crois, en grande partie dérobés aux Autrichiens ;
les réclamer et en poursuivre la rentrée.
11 - Il court des bruits sur un
testament du patriarche de Venise ; il faut les approfondir.
12 - J'avais laissé à Malmaison,
indépendamment de tous mes livres, 2 millions en or et bijoux dans une
cachette. Donation spéciale n'en a jamais été faite à l'impératrice Joséphine,
Je déclare que cette somme soit réclamée par mes exécuteurs testamentaires,
mais dans le cas
seulement où cela serait nécessaire
pour compléter mes legs.
13 - J'ai donné à l'impératrice Marie-Louise
2 millions en or à Orléans, qu'elle me doit ; mais je désire que cette somme ne
soit réclamée qu'autant que cela sera nécessaire pour compléter mes legs.
14 - J'ai, chez Denon et d'Albe, une
grande quantité de plans qui m'appartiennent, puisque j'ai payé pendant
plusieurs années 10 ou 12 000 francs par mois pour la levée et confection de
ces plans et dessins. S'en faire rendre compte et faire faire remise pour mon
fils.
15 - Je désire que mes exécuteurs
testamentaires fassent une réunion de gravures, tableaux, livres, médailles,
qui puissent donner à mon fils des idées justes, et détruire les idées fausses
que la politique étrangère aurait pu vouloir lui inculquer, afin qu'il soit
dans le cas de voir les choses comme elles ont été. En imprimant mes campagnes
d'Italie et d'Egypte, et ceux de mes manuscrits qu'on imprimera, on les dédiera
à mon fils, ainsi que les lettres des souverains, si on les trouve ; on doit
pouvoir se les procurer aux archives, ce qui ne doit pas être difficile,
puisque la vanité nationale y gagnerait beaucoup.
16 - Si on peut se procurer une
collection de mes quartiers généraux, qui était à Fontainebleau, ainsi que les
vues de mes palais de France et d'Italie, on en fera une collection pour mon
fils.
17 - Constant m'a beaucoup volé à
Fontainebleau ; je crois que de lui et de Roustan on peut tirer beaucoup de
choses précieuses pour mon fils, et qui pour eux n'ont que des valeurs
métalliques.
18 - Il y avait dans mes petits
appartements aux combles des Tuileries un grand nombre de chaises faites par
Joséphine et Marie-Louise, qui peuvent être agréables à mon fils.
19 - Quand mes exécuteurs
testamentaires pourront voir mon fils, il redresseront ses idées avec force sur
les faits et les choses, et le remettront en droit chemin.
20 - Quand ils pourront voir
l'impératrice, ce que je désire qui soit isolément et aussitôt que la prudence
le permettra, ils feront de même.
21 - Sans désirer que ma mère, si elle
n'est pas morte, fasse d'avantages à mon fils (par son testament), que je
suppose plus riche que ses autres enfants, je désire cependant qu'elle le
distingue par quelque legs précieux, tels que portrait de ma mère, de mon père,
ou de quelques bijoux qu'il puisse dire tenir de ses grands-parents.
22 - Aussitôt que mon fils sera en âge
de raison, ma mère, mes frères, mes soeurs, doivent lui écrire et se lier avec
lui, quelque obstacle qu'y mette la maison d'Autriche alors impuissante,
puisque mon fils aura sa propre connaissance.
23 - Je verrais avec plaisir ceux de
mes officiers ou domestiques qui pourraient s'attacher au service de mon fils,
soit les enfants de Bertrand, soit ceux de Montholon, etc.
24 - Engager mon fils à reprendre son
nom de Napoléon, aussitôt qu'il sera en âge de raison et pourra le faire
convenablement.
25 - On doit trouver chez Denon,
d'Albe, Fain, Menneval, Bourrienne, beaucoup de choses d'un grand intérêt pour
mon fils.
26 - En faisant imprimer mes mémoires
d'Italie, se servir d' Albe pour les plans. J'ai fait relever tous les plans de
bataille ; il paraît même qu'il les a imprimés. On pourra se procurer au dépôt
de la guerre des plans que j'avais faits de plusieurs batailles. Je soupçonne
que Jomini en a eu connaissance.
27 - Mes exécuteurs testamentaires
doivent écrire au roi d'Angleterre en passant en Angleterre, et insister pour
que mes cendres soient transportées en France ; ils doivent écrire de même au
gouvernement en France.
28 - Si Las Cases remplit les fonctions
de trésorier, et que mes exécuteurs testamentaires jugent nécessaire d'avoir un
secrétaire, et que cela convienne à Drouot, ils pourront le nommer.
29 - J'ai une petite cousine à Ajaccio,
qui a, je crois, 300 000 francs en terres, et s'appelle Pallavicini ; si elle
n'était pas mariée et qu'elle convînt à Drouot, sa mère, sachant que cela était
mon désir, la lui donnerait sans difficulté.
30 - Je désire qu'il soit manifesté à
ma famille que je désire que mes neveux et nièces se marient entre eux, ou dans
les Etats-Romains, ou dans les républiques suisses, ou dans les Etats-Unis
d'Amérique. Je blâme le mariage avec un Suédois ; et, à moins d'un retour de
fortune en France, je désire que le moins possible mon sang soit à la cour des
rois.
31 - On peut trouver chez Apiani,
peintre à Milan, beaucoup de choses importantes pour mon fils. Mon souvenir
fera la gloire de sa vie. Lui réunir, lui acquérir, ou lui faciliter
l'acquisition de tout ce qui peut lui faire un entourage dans ce sens.
32 - S'il y avait un retour de fortune,
et que mon fils remontât sur le trône, il est du devoir de mes exécuteurs
testamentaires de lui remettre sous les yeux tout ce que je dois à mes vieux
officiers et soldats et à mes fidèles serviteurs.
33 - Entretenir par lettres, et
lorsqu'on pourra la voir, l'impératrice Marie-Louise, de l'estime et des
sentiments que j'ai eus pour elle, et lui recommander toujours mon fils, qui
n'a de ressources que de son côté.
34 - Si le député Ramolino est à Paris,
on pourra se servir de lui pour le consulter sur l'état de ma famille et la
manière de correspondre avec elle.
35 - Je désire que mes exécuteurs
testamentaires se procurent les dessins les plus ressemblants de moi sous
divers costumes, et les envoient à mon fils aussitôt qu'ils le pourront.
36 - Ma nourrice à Ajaccio a des
enfants et petits-enfants que le grand sort que je lui ai fait l'a mise à même
de bien élever. Je la suppose morte. D'ailleurs je la crois fort riche; si
cependant par un caprice du sort, tout ce que j'ai fait pour elle n'avait pas
bien tourné, mes exécuteurs testamentaires ne la laisseraient pas dans la
misère.
37 - Je ne serais pas fâché que le
petit Léon entrât dans la magistrature si cela était de son goût. Je désire
qu'Alexandre Walewski soit attiré au service de France dans l'armée.
NAPOLEON